Le général Jean Bosco Kazura effectue le 14 mars une visite officielle sans précédent dans la capitale française.
Un an plus tôt, le scénario aurait été difficile à imaginer. A l’invitation du général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées françaises depuis juillet 2021, un groupe de quatre officiers des Forces de défense rwandaises (RDF) sera reçu en France du 14 au 17 mars.
Ils seront dirigés par le général Jean Bosco Kazura, chef d’état-major des FDR depuis 2019. Après avoir rejoint la rébellion du Front patriotique rwandais (FPR) pendant les années de lutte (1990-1994), ce militaire – dont la famille a dû s’exiler au Burundi – a ensuite occupé plusieurs hautes fonctions au sein de l’armée rwandaise.
En juin 2013, il a été nommé à la tête de la mission de la Minusma de l’ONU, au détriment du général tchadien Oumar Bikimo. Cela a mis en colère le Nigeria, qui a décidé de retirer ses troupes du pays.
Reprise de la coopération militaire
La délégation rwandaise attendue à Paris comprendra également les généraux de brigade Patrick Karuretwa (chef de la coopération militaire internationale et ancien secrétaire particulier et conseiller du président Paul Kagame) et Vincent Nyakarundi (chef du renseignement militaire), ainsi que le colonel Jean Chrysostome Ngendahimana (J3 – chef des opérations et de la formation).
À l’ordre du jour, la reprise de la coopération militaire entre les deux États, dont la relation bilatérale ne cesse de s’améliorer ces dernières années, notamment depuis l’élection d’Emmanuel Macron.
En mai 2021, le président français a effectué une visite hautement symbolique au Rwanda, avec un discours au Mémorial de Gisozi à Kigali. Il a été jugé plus contrit que celui tenu onze ans plus tôt au même endroit par Nicolas Sarkozy.
« La France n’a pas compris qu’en voulant prévenir un conflit régional ou une guerre civile, elle se tenait en fait aux côtés d’un régime génocidaire« , a résumé Macron. « En ignorant les avertissements des observateurs les plus lucides, la France a porté une responsabilité écrasante dans un engrenage qui a conduit au pire, alors qu’elle cherchait précisément à l’éviter.«
LIRE AUSSI: Enquête – Comment le Burkina Faso est devenu l’épicentre du conflit au Sahel
Quelques semaines plus tôt, le rapport de la commission Duclert, initié par Emmanuel Macron, avait également permis d’aplanir le vieux contentieux entre Paris et Kigali, dû à la longue complicité entre le régime de François Mitterrand et celui de son homologue Juvénal Habyarimana.
Un gendarme du continent
Les choses ont changé depuis, le Rwanda ayant acquis le statut de « gendarme » continental, notamment en République centrafricaine (ancienne colonie française), où il intervient militairement tant dans le cadre de l’aide bilatérale que sous la bannière de l’ONU, et au Mozambique, où une rébellion islamiste menace non seulement la population civile mais aussi le projet gazier de TotalEnergies.
Entre 1990 et 1994, la coopération militaire entre les deux Etats avait été à l’origine de 28 ans de critiques contre le rôle de la France aux côtés du régime génocidaire. Depuis lors, elle est restée inexistante. Quelques mois après la nomination d’un nouvel ambassadeur de France au Rwanda, Antoine Anfré, après six ans de vacance, cette visite vise clairement à tourner cette page.